Pianos historiques : un héritage dilapidé ?

Nous nous sommes réveillés un matin et nous nous sommes aperçus que des instruments sublimes, conçus par un artisanat hautement spécialisé et couverts de bois précieux, étaient tout simplement envoyés à la déchetterie car ils étaient trop grands et que les gens qui les avaient fabriqués ne les défendaient plus. Passés de mode ! Cet article n’est pas qu’un point d’interrogation, c’est aussi un appel au secours.

1 Edwin Good, Giraffes, Black Dragons and other Pianos, a Technological History from Cristofori to the Modern Concert Grand, Stanford Université Press, Stanford, California, second edition, 2001.

2 Un plectre est un dispositif permettant de pincer ou de gratter les cordes d’un instrument.

3 Le Concert spirituel était une organisation de concerts, instituée sous l’Ancien Régime, de 1725 à 1790. Il cessa d’exister avec l’abolition des privilèges mais son nom resta longtemps dans les mémoires. Les concerts se donnaient les jours où il n’y avait pas d’opéras.

L’histoire de la facture de piano recouvre l’histoire de l’industrialisation en Occident. Au XVIIIe siècle, la passion pour la recherche a poussé les techniciens de la musique à trouver le moyen d’obliger un instrument à clavier à exprimer des nuances, des couleurs qui se trouvent habituellement dans le frottement des cordes ou la subtilité du souffle. La nuance, c’était cela qui était demandé au nouvel instrument, le piano-forte. C’est aussi, dès le début, cette antinomie entre la production du son, percussive, et le but recherché, le changement expressif du son, qui a dû fasciner fabricants et musiciens. On demandait au progrès technique de s’imposer de façon inégalée jusque dans le domaine musical. Même un orgue est moins compliqué. Le violon, quatre cordes qui sonnent, n’a pas de mécanique. C’est pourquoi le piano-forte a mis beaucoup de temps à se mettre au point. Entre sa création dans les années 1700 par un facteur de clavecin imaginatif, Bartolomeo Cristofori, et l’exigence du monde musical à profiter de cette invention, il s’est passé environ 80 ans.

Piano carré n°7289, du fa au do, 1808. Photo Françoise Tillard.

Comme le montre très bien Edwin Good dans Giraffes, Black Dragons and Other Pianos1, les inventions n’ont d’efficacité que si elles sont relayées par une demande du public, musiciens et auditeurs confondus, qui peut constituer un contexte favorable à l’expérimentation et à la marchandisation. L’invention de Cristofori, bien que reprise par plusieurs facteurs passionnés tel Johann Gottfried Silbermann (1683-1753), ne put cependant se développer tout de suite et passa lentement par tous les stades de l’expérimentation. Et il était compliqué de passer du simple plectre2 qui venait gratter la corde puis retombait, à un marteau qui déjà multipliait le mouvement de la touche pour la frapper fort ou doucement puis retombait en douceur. « Fort » et « doucement » étaient au demeurant des notions toutes relatives et le son était toujours celui d’un clavecin ou d’un clavicorde.
Cette possibilité de nuances s’est imposée pendant la période dite classique ou « Sturm und Drang » (orage et passion), où l’expression de la sensibilité humaine fut considérée comme un progrès artistique. Les vingt dernières années du XVIIIe siècle ont ainsi non seulement produit les chefs-d’œuvre de Mozart et de Haydn, mais donné lieu à un foisonnement de pièces de qualité : celles de Méhul, des frères Jadin, de Dalayrac ou d’Hélène de Montgeroult… alors que la fonction rythmique et harmonique du clavecin dans le continuo n’était plus requise à partir des années 1770. Tous les instruments participaient à ce changement et à cette expressivité nouvelle mais aucun ne subit un aussi profond changement de mécanique. La clarinette fut certes créée à partir du chalumeau du temps de Vivaldi, et hautbois, flûte, basson, cuivre, cordes et archets, également modernisés pour plus d’efficacité et de son. L’orchestre dit moderne fut organisé, sans clavecin. À l’apogée des concerts spirituels3, l’orchestre de Paris avait une plus haute réputation que l’orchestre de Mannheim, modèle de l’orchestre de Mozart. Mais tous les pistons et propositions imaginatives appliquées aux vents et aux cordes, même si elles ont transformé les instruments, n’ont pas atteint la dimension créative du développement du pianoforte.
C’est que cet instrument s’est trouvé le support de l’ambition culturelle de son époque : faire chanter une mécanique dans le prolongement du doigt, prouver que le progrès humain pouvait se manifester par la technologie.

Ce fut alors un âge d’or pour les facteurs de piano, période faste qui dura jusqu’à la crise de 1929.

4 Shudi, Broadwood, Longman & Broderip, Clementi, Wornum, Stodart…

5 Je ne parlerai pas du tout ici de la révolution qu’Érard fit connaître à la harpe.

6 Se souvenir du fameux tableau de Josef Danhauser (1805-1845), Franz Liszt au piano (1840), (Staatliche Museum zu Berlin, Nationalgalerie) montrant Liszt au milieu de ses amis parisiens, Marie d’Agoult à ses pieds, alors que la scène se passe justement dans le salon du facteur de pianoforte Conrad Graf (1782-1851) à Vienne, et que le piano est bien sûr un Graf. Le but de la commande de Graf était de montrer que Liszt ne jouait pas que sur Érard !

Certains battirent des fortunes immenses, stimulés par un marché européen en pleine expansion où les savoirs se complétaient ou/et se concurrençaient. D’un côté les pianos viennois et leurs héritiers, Stein, Walter, Graf et de l’autre le piano franco-anglais, à la mécanique plus efficace, qui au cours des années a conduit à la virtuosité. Tout d’abord Broadwood (1732-1812) en Angleterre, chez qui l’Alsacien Érard (1753-1831), facteur officiel de Louis XVI, étudia pendant la Révolution. Les mécaniques anglaises4 étaient en effet hors pair. Sébastien Érard avait laissé à Paris en 1786 son entreprise à son frère et associé Jean-Baptiste au 13 du Mail, là où elle restera jusqu’à sa fermeture en 1971.
Érard5 fut rejoint par Pape, Pleyel, Boisselot, Herz, Kriegelstein… plus tard Gaveau. La facture française devint la référence, avec des pianos carrés puis des pianos à queue, alors appelés « en forme de clavecin », plus puissants, qui remplirent rapidement les salons. La prise de pouvoir technique est prodigieuse à décrire. Entre le piano de Mozart des années 1780 et le piano de Chopin des années 1840, une vie s’est écoulée qui a vu un bouleversement esthétique sans pareil.
Pour ne pas se perdre dans l’histoire détaillée de cette période foisonnante, il faut se souvenir que notre sujet n’est pas ce qui était mais ce que nous sommes devenus. Or nous n’avons retenu que les grands compositeurs et les grands noms. Pendant la période dite classique, Mozart, Haydn, Beethoven, que s’est-il passé là où ils n’étaient pas ? Il faut bien avouer que nous Français, nous projetons sur notre passé musical un vide absolu. La période classique, en France, n’a pas produit de très grands noms de compositeurs. La vie musicale était néanmoins d’une vitalité sans pareille. Et l’exigence de qualité a fait faire à la facture instrumentale des bonds fabuleux. Entre les pianofortes carrés que Sébastien Érard a conçus dans les années 1780 et les pianos en forme de clavecin, les petits et grands modèles des années 1840, il s’est passé un monde de changements et deux révolutions.
Nous pouvons peut-être comparer ce retournement avec la révolution numérique et la sophistication progressive de nos téléphones portables et de nos ordinateurs. En avions-nous besoin ? Il semblerait. La séduction de la technologie et l’appât du gain ont fait le reste. Rétrospectivement, nous pouvons nous imaginer la fascination pour le dernier instrument construit, la dernière innovation conçue par l’un ou l’autre des facteurs. Érard ou Pleyel ? Ou Boisselot, Pape, Herz ou Kriegelstein ? Pourquoi ne pas faire venir un Broadwood de Londres ? Les pianos viennois, Stein, Streicher, Schanz ou Graf6 subirent cette concurrence de plein fouet, avec tout le talent pour le marketing que pouvaient déployer les grandes firmes françaises et parfois aussi leur peu de scrupules… Les pianos viennois avaient pourtant de nombreux atouts : ils étaient plus légers, plus fins et… moins coûteux à produire. Mais une fois qu’Erard eut déposé en 1821 son fameux brevet sur le double échappement, la cause fut entendue, le piano moderne était né : c’est avec son doigt que le pianiste contrôlera le mouvement de la touche, pouvant l’arrêter à mi-hauteur et répéter facilement la même note. Chopin pouvait paraître, même si lui-même préférait la douceur des Pleyel à la brillance des Érard.
Je me demande si le raccourci « piano » n’apparut pas à ce moment de victoire de la facture franco-anglaise. Les Français et les Anglo-Saxons parlent tous de pianos, les Allemands de « Klavier » ou de « Flügel » tandis que les Italiens en sont restés à « pianoforte », puisqu’ils savent pertinemment que « piano », tout seul, ne veut rien dire. Et par voie de conséquence, on dit aussi pianiste, dans toutes les langues.
Parallèlement à la facture instrumentale se développait l’édition musicale, produisant une masse de pièces, mais pas seulement pour piano seul. C’est l’époque de l’essor de la musique de chambre. En effet, une des fonctions de l’instrument à clavier qui peut jouer plusieurs notes simultanément, c’est de donner non seulement le rythme mais aussi l’harmonie. Le clavecin, notamment à l’intérieur du continuo, tenait cette fonction. Les premiers pianofortes étaient trop faibles (ou trop laids, disait Voltaire) pour soutenir les autres instruments, c’était donc cordes et bois qui étaient appelés à la rescousse pour soutenir l’instrument vedette qui gardait cependant toute la magie de sa technologie nouvelle.
Le piano à partir de la fin du XVIIIe siècle et jusqu’au milieu du XXe, devint l’instrument dominant, celui par qui passaient tous les répertoires. Il y eut même des compositeurs qui n’écrivirent que pour lui. Il exprimait à la fois la sensibilité du moment et la foi inconditionnelle dans le progrès technique, susceptible de résoudre tous les problèmes de l’humain. Le Lied naquit alors, forme où le dit du chanteur est supplanté par le non-dit du piano, reflet subtil d’un texte qu’il magnifie. Mozart, Haydn, Beethoven puis Schubert, Schumann et Mendelssohn (pour rester dans les célébrités) écrivirent des parties de piano totalement dominantes dans toutes leurs œuvres incluant cet instrument. Le piano gagnait de la puissance sans perdre l’exigence de clarté polyphonique d’un instrument qui se voulait universel. Il faut relire le début du Cousin Pons pour comprendre à quel point les contemporains (c’était pleinement le cas de Balzac !) étaient conscients d’assister de leur vivant à une explosion technique à laquelle le malheureux Pons ne participera pas.

Cela se passait à Paris. À un moment donné, le quart des pianos vendus dans le monde était français.

7 Giraffes, Black Dragons and other Pianos, op.cit., p.216-217.

8 Une grosse majorité de pianos carrés, pour le salon et le marché intérieur.

La conduite commerciale de la maison Érard était alors plus qu’agressive. Il y avait les grands modèles de concert où s’expérimentaient les dernières idées et les derniers perfectionnements mais également des modèles plus petits ainsi que des pianos droits pour les salons. Le piano devint très vite un signe d’appartenance et de reconnaissance sociales, non seulement un signe extérieur de richesse mais aussi la preuve qu’on était bien dans le coup ! Un piano droit est en effet un monument et un témoignage de la confiance inconditionnelle en la technique : jusque-là, le mécanisme des clavecins, pianos carrés ou piano à queue marchait dans un seul sens, le marteau allant pincer ou frapper la corde et retombant par le simple fait de la gravité. Avec le piano droit il fallut inventer deux mécanismes, un pour l’aller et un pour le retour. Il fallait donc vraiment y croire…
Mais l’exclusivité des brevets passe aussi. Jusque-là Érard était à la pointe du progrès et les pianos français dans son sillage. En 1850, l’instrument approchait de la perfection. Il était au sommet de sa puissance, à la fois égal sur tout le registre et harmoniquement clair, les notes toujours distinctes. Un orchestre à lui tout seul.
En 1848, un collègue et concurrent d’Érard, Herz, toujours à la recherche du « progrès » et qui avait déjà perfectionné le double échappement, tenta de croiser les cordes. Cela leur permettait d’être plus longues et plus sonores. Le son grossit en effet mais perdit de sa clarté. Avec les cordes croisées, les harmoniques devinrent confuses et il était impossible de soulever les étouffoirs de la pédale forte comme on le pratiquait jusqu’alors. Érard refusa cette évolution.
En revanche un facteur allemand de Seesen, Steinweg, qui était parti pour les États-Unis d’Amérique refonder là-bas sa maison sous le nom de Steinway, s’empara du brevet. Les frères Steinway étaient bâtis pour gagner le monde. Leurs pianos bénéficiaient de toute la technique la plus moderne qui à ce point du développement du piano ne concernait plus la subtilité de la mécanique mais sa puissance, son efficacité et la facilité de production. La fonte envahissait l’instrument, de plus en plus facile à accorder. En même temps, une publicité sans relâche s’appliquait à convaincre le monde entier que les Steinway et leurs cordes croisées étaient « les meilleurs » et ceux qui représentaient le mieux l’esprit « progressiste » de l’époque.
Un choix esthétique se posa alors plus nettement : clarté ou puissance ?

Piano Erard à queue grand modèle n°16036, 1843. Clavier agrandi plus tard, deux notes supplémentaires, sol# la. acajou uni. Photo Françoise Tillard.

Pour des raisons de taxation, Steinway ouvrit une manufacture en Allemagne dès 1880. La question de savoir si le piano Steinway, aujourd’hui, peut être considéré comme américain ou allemand reste ouverte. Il répondait certainement à une vision plus « Nouveau Monde » de la salle de concert, qui s’ouvrait alors à un public plus large. L’évolution du son du piano correspond à celle du goût général pour l’ornementation chargée. Quelques chiffres, recueillis dans Giraffes7 en donnent la mesure : en 1850, l’Angleterre produit 23 000 pianos8, la France 10 000, pas de chiffre pour l’Allemagne, et les États-Unis 9000. En 1870, le renversement de tendance est déjà bien amorcé : 25 000 pianos sont produits en Angleterre, 21 000 en France, 15 000 en Allemagne, 14 000 aux États-Unis. En 1890, le rapport de force s’est totalement inversé : 50 000 pianos en Angleterre, 20 000 en France, 70 000 en Allemagne, 72 000 aux États-Unis. La production allemande et américaine écrase désormais le marché alors que la production des pianos franco-anglais demeure artisanale. D’autres statistiques, glanés page 217 du même ouvrage, corroborent cette prise de pouvoir germano-américaine : si dans les années 1860, la France vend encore 40% des 50 000 pianos produits chaque année dans le monde, en 1910, sa part de marché n’est plus que de 4%, en dépit d’une production de 650 000 pianos, en croissance de 25%.
Il est certain que les Français ne sont pas allés à la conquête de nouveaux marchés. Érard a continué à faire des pianos à cordes parallèles et à peaufiner fanatiquement chaque instrument sorti de son atelier. La qualité parlait pour elle-même. C’était par conviction que les cordes croisées n’étaient pas adoptées, le brevet n’étant pas considéré comme un progrès objectif. La légende orale des amoureux d’Érard nous dit que la firme allait de tout temps débaucher chez les concurrents les meilleurs ouvriers, les rémunérant mieux que partout ailleurs. Cela donne effectivement des instruments qui affrontent le temps : l’ébénisterie résiste de façon spectaculaire, le meuble ne bouge pas, les ivoires restent alignés comme au premier jour…

Cependant le XXe siècle a vu les instruments allemands gagner la partie avec d’abord Steinway, mais aussi Bechstein, Blüthner et l’autrichien Bösendorfer.

9 Olivier Barli, La Facture française du Piano de 1849 à nos jours, La Flûte de Pan, Paris, 1983, p.259.

10 Union des Groupements d’Achats Publics, un service annexe de l’Éducation Nationale.

11 Op.cit., p.261.

12 Op.cit., p.268.

13 Op.cit., p.271.

14 Yamaha est une entreprise fondée en 1887 par Torakusu Yamaha, un horloger, pour la fabrication d’orgues, qui s’est diversifiée à partir de la Seconde Guerre mondiale (motos, etc.).

Et dans le même temps le piano est devenu un instrument tout noir (sans qu’il y ait à discerner ici une quelconque connotation politique ou idéologique !). Jean Louchet, de l’Association Piano historique – Fan d’Érard, avance l’idée que les Allemands, n’ayant pas de colonies, n’avaient pas assez de bois précieux pour leur marqueterie. C’est possible, mais il y eut aussi cette mode masculine du noir dès la fin du XIXe siècle qui faisait passer l’un des instruments emblématiques du monde féminin – peut-être aussi français, léger et aristocratique – du côté des gens sérieux qui gagnaient beaucoup d’argent. Par quel tour de passe-passe en est-on venu à préférer un instrument noir au vernis synthétique à un instrument en bois précieux, palissandre, acajou ou courbaril ?
Curieusement, les nouveaux instruments de plus en plus puissants (même s’ils l’étaient moins que les Steinway d’aujourd’hui) correspondaient de moins en moins à la musique telle que les compositeurs continuaient à l’entendre. C’était de moins en moins le piano de Chopin et de Schumann. Fauré, Saint-Saëns, Chabrier jouaient sur des pianos français, bien sûr. Debussy également, même s’il disait aimer beaucoup les Bechstein, plus légers que la plupart des pianos allemands. Et Ravel en resta toute sa vie à son modèle 1 Érard tel qu’on le voit à Montfort-l’Amaury. Brahms composa toute sa vie sur son Streicher à cordes parallèles, typique de la tradition viennoise, très légère et transparente. Finalement, les compositeurs qui correspondaient le mieux au modèle Steinway seraient, de cette époque, Wagner et Strauss, pas vraiment des spécialistes du piano, malgré les magnifiques Lieder de Richard Strauss.
Est-ce également à cause de cette surpuissance que l’on a cessé de vouloir entendre le piano ? Quand a-t-on commencé à fermer son couvercle dans les salles de concert, supprimant ainsi toutes ses harmoniques ? Comment fait-on pour mettre la pédale comme indiquée par le compositeur – Liszt ou Fauré, par exemple – si soulever les étouffoirs déclenche un vrai brouillard de notes rendant l’harmonie incompréhensible et déroutant les partenaires des pianistes ? La musique de chambre avec piano, au répertoire vertigineux, s’en trouve complètement défigurée. Le piano roi, sommet du progrès technique, comme l’ont conçu les premiers facteurs, doit s’amoindrir et se faire oublier pour que la vedette revienne à l’instrument dit soliste, que ce soit un chanteur, un violon, une clarinette… Le piano, en musique de chambre, ne doit plus se faire entendre. Était-ce alors vraiment la peine de rendre l’instrument surpuissant ?
La vente d’instruments ne cessa cependant de se développer pendant la fin du XIXe et le début du XXe siècle. La Première Guerre mondiale ne freina pas vraiment cet élan puisque le piano était également appréhendé comme un investissement. En revanche, tous les facteurs d’instruments subirent de façon désastreuse la crise de 1929. Il ne pouvait en être autrement, elle a été dans tous les domaines au cœur des catastrophes du XXe siècle. En France, les décisions qui ont suivi cette crise n’ont pas été adaptées. Érard (il avait beaucoup changé… et ne portait même plus ce nom) choisit de ne plus fabriquer de modèle de concert. Autant ne plus exister ! Une crise économique qui emporte tout conjuguée à deux guerres mondiales, ce n’est pas la peine d’en dire beaucoup plus : les réserves de bois bombardées (Bösendorfer), les interdits de production (Bechstein) et toutes les contraintes liées à l’Occupation puis à l’après-guerre…
Il n’en demeure pas moins que la fin des pianos français est avant tout un problème strictement français. Comme l’écrit Olivier Barli dans sa thèse publiée en 1983 : « En 1945, la France ne compte plus que six manufactures de pianos : Pleyel, Érard, Gaveau, Schindler, Elcké et Klein. Le cas de cette dernière étant mis à part, elles tombèrent toutes entre 1969 et 1974 »9.
On reconnaît la France à ses exceptions : au milieu du désastre, la manufacture Klein reste la plus vieille manufacture de piano au monde. Fondée en 1771, elle est toujours dirigée par un membre de la famille Klein, à Montreuil depuis 1871. Précisons qu’elle est la première à délocaliser sa production en Asie… En 1968, « les pianos Elcké et Schindler fournissent les écoles par l’intermédiaire de l’U.G.A.P10. Il semble que la qualité des pianos soit mise en cause… »11. Résultat : l’UGAP achète des pianos néerlandais et le marché des écoles échappe aux deux maisons qui produisaient encore jusqu’à 1500 pianos par an. Schindler fermera ses portes en 1969 et Elcké cinq ans plus tard. Elcké et Schindler étaient des maisons modestes et de ce fait aussi, la conviction qu’un piano français ne pouvait être que mauvais parcourait la société. Je me souviens qu’on m’obligeait, enfant, à jouer sur des instruments qui n’avaient probablement pas été accordés depuis la Grande Guerre … Nous avons tous été élevés à penser les instruments français comme innommables.
D’après Olivier Barli, aussi navré que moi d’écrire cette lamentable histoire, la chute de production des maisons Pleyel, Érard et Gaveau se prolongea après-guerre jusqu’en 1950 « pour se redresser dans la décennie suivante 1950-1960, du moins pour Érard et Gaveau, car pendant cette période, Pleyel continuait à décliner. On peut expliquer en partie ce phénomène par l’adoption qu’avait fait la firme Pleyel de la mécanique en matière plastique qui se révéla par la suite tout à fait catastrophique »12. Quelle déchéance !
Au XXe siècle, les trois grandes maisons citées produisirent pourtant d’excellents modèles de piano, souvent petits pour convenir aux appartements de plus en plus réduits, mais de grande qualité et de facture très soignée (à part il est vrai le plastique du mécanisme Pleyel…). Mais les revendeurs français continuaient à importer des pianos étrangers dont les producteurs leur proposaient des marges supérieures13. En 1967, j’avais encore un piano droit Gaveau. Le petit appartement surpeuplé où habitait ma famille lui avait laissé une place ridicule devant un radiateur qui le faisait souffrir. Le pianiste Pierre Barbizet avait alors écrit une lettre de recommandation pour moi à la maison Hanlet (concessionnaire Steinway) pour qu’ils vendent à ma mère, un piano Yamaha14 de qualité et pas trop dur pour mes poignets de petite jeune fille. Ma mère n’avait aucune idée… J’ai vite détesté cet instrument claquant qui finalement n’a pas bien vécu, même s’il ne fut jamais disposé devant un radiateur ! Comment un si grand pianiste, habitué aux pianos de qualité, a-t-il pu me conseiller cet instrument ? Comment tous ont-ils pu se laisser berner par la propagande moderniste qui prévalait ?

En 1969, Gaveau et Érard fusionnaient. Deux ans plus tard, Pleyel les rejoignit.

15 Op.cit., p.272.

16 Op.cit., p.318 et suivantes.

17 Pour plus d’information, on pourra se reporter à l’ouvrage de Jean-Jacques Trinques, Le piano Pleyel : d’un millénaire à l’autre, L’Harmattan, 2003.

18 Les éléments du piano étaient fabriqués par des sous-traitants, dont les plus éminents étaient Renner et Herrburger-Schwander. 
Renner (Louis Renner GmbH & Co. Kg) était une entreprise allemande de fabrication de mécaniques de pianos, fondée en 1882. Ses mécaniques équipaient, depuis la disparition du concurrent à Paris, la majorité des pianos européens de gamme supérieure et de haute facture. Renner fabriquait suivant la spécification des facteurs de pianos, et les cotes ainsi que certains détails de fonctionnement étaient adaptés à chaque demande. En juillet 2019, Renner perd son indépendance, rachetée par Steinways & Sons. 
Herrburger-Schwander était une fabrique de mécaniques et de claviers de pianos, fondée à Paris en 1844 par Jean Schwander, qui s’était ensuite associé avec Joseph Herrburger. Les mécaniques Schwander ont équipé pratiquement tous les pianos français des grandes marques (Pleyel, Érard et Gaveau), et nombre de pianos européens. Au début du XXe siècle Herrburger-Schwander était le plus important fabricant de mécaniques en Europe, livrant à de nombreuses marques de pianos, et fabriquant certaines mécaniques spécifiques pour Érard et Pleyel. 
Textes sur le site https://pianosmagne.fr/

Cependant les Affaires culturelles et le Conservatoire de Paris continuaient à acheter des pianos étrangers. La compagnie d’assurances majoritaire dans la gestion des trois maisons réunies en profita pour fermer la maison, mettre le personnel au chômage et vendre les trois marques à la maison allemande Schimmel15.
Rétrospectivement, comment avons-nous pu laisser ce scandale arriver ? Comment expliquer l’indifférence devant la fermeture de ces vieilles maisons ? Outre l’abandon d’un certain nombre de valeurs universelles et la perte, profondément regrettable, d’un savoir-faire, il s’agit bien là de la première étape de la désindustrialisation qu’a dès lors subi notre pays, et qui préfigurait, toute proportion gardée, les délocalisations massives des années 80 et 90. Tous les fabricants de piano au monde ont éprouvé de graves difficultés dans ces années, nulle part ailleurs cependant les gouvernants et les musiciens ne les ont ainsi laissé tomber ! Mais cela vaut, me direz-vous, pour la majeure partie des branches de l’industrie française…
C’est d’autant plus désolant que la musique et son enseignement firent un bond en avant considérable dans cette France des années 70. Pendant toute la fin du XXe siècle, des classes de piano se sont ouvertes pour répondre à l’accroissement d’une demande sans précédent. Elle profita essentiellement aux facteurs de piano asiatiques, principalement le japonais Yamaha qui proposait des pianos à queue ou droits ressemblant à des Steinway à des prix extrêmement compétitifs dans le cadre d’une mondialisation qui ne disait pas encore son nom.
Il y eut certes des gens courageux. Un piano Rameau16 vit le jour à Montreuil en 1971, avec l’aide du Ministère des Affaires culturelles, avec le savoir-faire et le nom des marques Pleyel-Érard-Gaveau. Après des aléas techniques, la production de pianos droits commença en 72. En 1973, la maison fêtait son 1000e piano. Mais les locaux étant trop étroits, une usine plus efficace fut construite à Alès. Les pianos construits dans les vingt ans qui suivirent étaient d’une qualité remarquable. Dans les années 1980, on pensait, non seulement augmenter la production mais lancer un modèle de piano à queue. Les pianos asiatiques s’appliquèrent à briser ce rêve en cassant résolument le marché. Les pianos français étaient trop chers. De plus, les pianos numériques firent leur apparition, achevant de faire chuter les ventes de pianos acoustiques. Quelques chiffres : en 1980 il s’est vendu 40 000 pianos en France, en 2020 seulement 600017. L’usine d’Alès a ainsi fermé en 2007. Dernier baroud d’honneur ! Ensuite, c’est très compliqué. Les pianos furent assemblés en Indonésie, puis l’ensemble a été repris par l’homme d’affaires Hubert Martigny, racheteur un temps de la Salle Pleyel… Aujourd’hui les pianos Rameau (& co…) ne sont plus produits. Il n’y a plus de pianos français. Sauf Klein.
Mais…
Il y a le Bon Coin ! Quiconque veut s’acheter un piano Rameau le trouve sur l’heure entre 200€ et 600€. Je viens d’essayer. Et ce sont des mécaniques d’une solidité à toute épreuve. Cela prend à peine plus de place qu’un piano numérique, c’est moins cher et cela dure beaucoup plus longtemps, en tout cas ceux qui sont pourvus d’une mécanique Renner18.

Après la descente aux enfers, il est temps de montrer le chemin de la rédemption.

19 À consulter à ce propos le site de l’entreprise Maene https://www.maene.be/fr

20 À écouter : entretien de Stephen Paullelo avec Ziad Kreidy disponible sur YouTube https://www.youtube.com/watch?v=x0XVQstTIsc

21 Il nous faut signaler les concerts au Château de Champs-sur-Marne sur un Érard n°3 de 1875 (https://www.chateau-champs-sur-marne.fr/decouvrir/un-piano-prestigieux-et-une-histoire-palpitante) et le Festival Érard dirigé par Jérôme Granjon et Saskia Lethiec qui prépare sa troisième édition (https://festival-erard.fr/)

22 Lucas Debargue le 28 septembre 2024 écrivait sur Facebook : « Quelle serait la vie d’un musicien sans défis ? C’est toujours excitant pour moi de jouer sur des claviers de facture différente de celle à laquelle nous sommes habitués par défaut aujourd’hui. La découverte de pianos hors-normes invite un pianiste à renouveler sans cesse son approche instrumentale… ce qui ne peut que profiter à la musique, rétive à toute espèce de routine. Demain, je jouerai le premier concerto de Chopin à Narodowe Forum Muzyki avec Insula orchestra et Laurence Equilbey, sur un magnifique Érard 1858 provenant de The Fryderyk Chopin Institute ! »

23 N’oubliez pas d’aller visiter le Musée du Piano à Limoux, consacré au piano français, ou à défaut son site Internet  https://museedupiano.eu/ ainsi que la collection instrumentale de la Cité de la Musique. Le piano historique français n’y est sans doute pas seul à l’honneur mais il y en a, même s’ils ne sont pas tous en état de jeu.

Les nouveaux facteurs reviennent aux cordes parallèles. À la demande de Daniel Barenboim, Chris Maene19, à Bruges, en Belgique, a conçu un brevet concernant la table d’harmonie et les cordes parallèles qui retourne à la clarté des pianos français. En France, Stephen Paulello20 construit dans son atelier à Villethierry, dans l’Yonne, quelques pianos par an pour pallier le son unique des salles de concert. Son « opus 102 », datant de 2015, révolutionne la facture de piano en revenant simplement à la créativité du XIXe siècle. Avec l’aide de l’ordinateur… et l’utilisation des cordes parallèles, bien sûr. Il prend aussi les pianos existant (Pleyel, Bechstein), les restaure et les truffe d’une mécanique de sa conception. Non seulement ce sont de superbes instruments mais ils ont aussi le mérite d’être différents. Ce ne sont pas de faux Steinway. Ils ont une autre couleur, plus transparente et lumineuse, et ils ne se ressemblent pas entre eux. On retrouve l’artisanat !
Les musiciens se rendent compte tout doucement qu’il est plus facile de jouer sur un instrument correspondant à la musique telle que l’entendait le compositeur ou la compositrice21. Stéphane Degout et Alain Planès enregistrent leur dernier CD « Fauré » sur un Pleyel « Grand Patron » de 1892. Une cantatrice venue du baroque comme Sandrine Piau ne peut que rechercher un instrument historique pour chanter Debussy. Lucas Debargue a joué récemment le premier concerto de Chopin à Wroclaw sur un Érard de 185822. Les bons accordeurs possèdent dans leurs arrière-boutiques un instrument ancien qu’ils bichonnent et dont ils apprennent la vérité du son. Si les maisons de piano se sont effondrées dans les années 60, c’est aussi que le niveau artistique, la relation entre formation musicale et culture générale chez les musiciens était à son plus bas niveau. Les enfants quittaient l’école vers 10 ans… pour faire des gammes toute la journée. Cela donnait des musiciens qui jouaient sans différencier les styles. Heureusement, grâce aux écoles de musique, les choses ont totalement changé. Mais les instruments authentiques n’ont pas encore repris le dessus.
Et à propos, comment nommer ces instruments que l’on veut jeter pour la seule raison qu’on ne reconnaît pas leur identité ? Entre le clavicembalo col forte e piano de Cristofori et un clavier numérique, on relève quantité d’artefacts qui s’appellent tous « pianos » mais qui n’ont plus grand-chose en commun, si ce ne sont des touches noires et blanches. On peut certes décider que le pianoforte désigne l’instrument de Mozart. Avec l’invention de l’échappement en 1821, devrait-on alors se contenter du « piano » pour désigner l’instrument de Chopin. C’est délicat… Pianoforte romantique ? Mais ensuite, quand on en vient aux cordes croisées, devrait-on conserver le même terme ? Peut-être que la pratique et le retour aux instruments authentiques nous soufflera une idée… Pour le moment, nous dirons « pianos historiques », faute de mieux, et « clavier numérique » pour tous les instruments qui n’envisagent pas le marteau comme une prolongation du doigt et qui n’ont plus rien de musical.
En dehors du Bon Coin, Internet a aussi le mérite de réunir les passionnés d’un sujet exclusif23. J’étais seule avec mon grand modèle Érard de 1843 quand j’ai été contactée par l’association Piano historique – Fan d’Érard qui m’a permis de rencontrer Jean-François Tobias, restaurateur de pianos qui a passé une grande partie de sa vie à aller sauver des instruments magiques en péril et les ramener chez lui, à la Maison du Piano historique de Briare-le-Canal, dans le Loiret. Combien sont-ils maintenant, ces rescapés ? 200, 300 ? Couchés sur chant, attendant qu’on les restaure et qu’une nouvelle vie leur soit proposée. Jean-François procède un par un, il en a pour 200 ans de travail… Ce ne sera pas la croissance excessive et malsaine qui enrichit quelques-uns en étouffant les autres. Il s’agit là de sauver le patrimoine à prix coûtant : au lieu d’aller chercher au bout du monde un instrument plus ou moins bon et construit trop vite, aller protéger un chef-d’œuvre en péril et le faire restaurer par un artisan. Cela coûte environ 10 000 euros par piano. Quand l’artisan est connu, il prend plutôt 20 ou 30 000 euros. L’instrument moderne neuf s’achète 100 000 ou 200 000…

Il faut soutenir les artisans, ressusciter les savoir-faire.

24 Ne pas oublier la première firme américaine, Chickering, qui ouvrit à Boston en 1823. Elle fut écrasée par Steinway, vers 1860. Liszt possédait un Chickering. La compagnie déclina doucement et s’éteignit en 1985.

25 On consultera avec profit le site http://www.pianos.fr

Les pianistes amoureux du son des pianos anciens sont de plus en plus nombreux : Cyril Huvé depuis toujours, tout comme moi-même, Rémi Cardinale, Mathias Weber, Joël Rigal, Alain Planès, Maria Joāo Pires, Jean-François Heisser, Laurent Cabasso, Bertrand Chamayou, Antoine de Grolée et bien d’autres se laissent séduire par la clarté et la souplesse de l’authenticité.
Il faut convaincre surtout les professeurs de piano. Aujourd’hui, à Paris, il y a des classes de pianoforte mais curieusement, les professeurs n’en sont pas français. Anne le Bozec, au Conservatoire national de Paris (CNSM), a certes des pianos historiques dans sa salle, mais elle n’est pas prof de piano mais d’accompagnement. La professeure de pianoforte au CNSM, Daria Fadeeva, est biélorusse. Paolo Montebugnoli, au Conservatoire à rayonnement régional de Paris (CRR), est italien, tandis qu’au Conservatoire Charles Munch, Natalia Valentin vient du Venezuela pour nous dire d’arrêter de nous lamenter et de profiter de ce que nous avons.
Les pianofortes et les pianos jusqu’en 1850 sont peu nombreux et considérés comme muséaux. Cela les protège un tant soit peu. Ce sont les pianos historiques entre 1850 et 1970 qui sont en danger, tous, à cordes parallèles ou non, français, allemands ou américains24. Si le public entier comprenait qu’ils sont en fait meilleurs que les pianos industriels, je ne donnerais pas cher du futur de ces derniers. C’est pourquoi les attaques contre les pianos anciens sont si dures, et les instruments français si dévalués. C’est pourquoi on les jette… L’association Piano historique – Fan d’Érard5 travaille à en constituer une base de données afin de leur redonner une identité et les protéger, les écouter. La Maison du Piano historique rassemble tous ceux que l’on peut sauver. Quelques artisans se spécialisent et luttent contre leur dévalorisation, comme Sylvie Fouanon25. Mais il faudrait que la mobilisation soit nationale et que l’État s’en mêle (un peu). Combien en reste-t-il, 300, 3000 ou 30 000 ? Que l’on nous aide !
À quel moment le piano est-il devenu un fantasme social, et non plus une manifestation du progrès humain ? Cela a dû commencer après la Première Guerre mondiale et la perte de confiance dans une technologie dont on avait vu les ravages. Le doigt qui, pressant la touche, pouvait déclencher des merveilles de musique avait pendant ces quatre années provoqué des horreurs. Nous avons vu pendant la cérémonie d’ouverture des derniers Jeux olympiques plusieurs pianos noirs ruisselant sous la pluie. La musique en direct était une pure illusion. Le jeu entre réalité sonore et musique enregistrée était brillant. Un des pianos prenait feu… Le son d’un autre se transformait en orchestre. Rien n’était réel mais la représentation était parfaite. Par bonheur, aucun des instruments défiant l’averse n’était un piano historique. Mais nous constations de nos yeux le mépris porté à cette représentation du passé devenue du vernis synthétique sur un bois quelconque, recouvrant une mécanique remplaçable. La technologie du piano n’intéresse plus, elle n’exprime plus pour nous une avancée pour l’humanité. Elle est sous l’eau… Malgré les prouesses électroniques de cette cérémonie, peut-on dire que nous avons toujours foi dans le progrès ? Que nous reste-t-il dans les mains ? De magnifiques instruments, trésors d’intelligence et d’imagination que les facteurs du passé nous ont laissés et auxquels nous devons faire prendre un nouveau départ.

Françoise Tillard, pianiste et chef de chant, se consacre essentiellement à la musique de chambre, à la mélodie et au lied. Sa thèse sur Fanny Hensel est publiée chez Symétrie (Fanny Hensel, née Mendelssohn Bartholdy). Elle a publié à la Lettre du Musicien un pamphlet, Musicienne et Citoyenne. Elle dirige l’association Parole et Musique  et la série de concerts « Dimanches musicaux du XIVe » à l’Auditorium Darius Milhaud de Paris.

L’article que vous venez de lire a paru dans les Cahiers Maria Szymanowska n°6 (Paris, 2025)

© Le piano historique - Fan d'Érard